La gentiane jaune (gentiana lutea) prospère dans les prairies subalpines, entre 1000 et 2300 m. Elle est bien connue des alpagistes et des promeneurs ici sur les versants des Aravis. Ses tiges élancées jusqu’à un mètre et demie de hauteur sont creuses et portent des feuilles elliptiques (glabres) opposées. Cette plante renferme des principes amers de sorte que le bétail l’évite. Ses racines procurent une eau-de-vie médicinale (plante fébrifuge très énergique qui stimule les fonctions digestives et possède un effet antidépresseur). La gentiane entre aussi dans la composition de la Suze, apéritif où vous reconnaîtrez facilement son goût amer.
Comment se la procurer ? Il faut d’abord préciser que la cueillette de la gentiane est protégée. Le propriétaire peut la collecter sur son propre terrain mais l’arrachage sauvage dont on est parfois témoin dans nos alpages est interdit. On déterre les racines avec une pioche spéciale tout en veillant à ne pas retourner tout le champ. Après avoir bien lavé à grande eau et brossé ces tubercules enrobés de terre, il faut broyer les racines (à l’aide d’un coupe-betteraves par exemple). Mises à cuver pour plusieurs mois dans un tonneau avec un peu de petit lait et de la levure de bière, ainsi que quelques kilos de sucre, elles vont produire un mélange fermenté. Un truc facile permet de repérer lorsque ce produit précieux est prêt pour la distillation : en approchant une flamme, celle-ci s’éteint à la surface de la cuve. II ne reste plus qu’à veiller le passage du bouilleur de cru. Cet artisan en voie de disparition assure encore ce service local (une fois par an à Flumet).
La distillation : il s’en charge très bien. Vous, vous n’avez qu’à acquitter les droits à la recette locale des impôts, avant de déguster cette eau de vie réservée aux goûteurs de sensations fortes puisqu’elle peut approcher les 50°.